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Sufficiency 2026 - Sobriété et bien-être énergétique : repenser les usages dans la transition
Résumé
Le projet Sufficiency 2026 vise à structurer une communauté scientifique autour des enjeux émergents de sobriété et de bien-être énergétique, piliers essentiels d’une transition vers un système énergétique durable, résilient et équitable. Il a pour objectif d’amorcer une dynamique de recherche interdisciplinaire, en articulant approches économiques, techniques, sociales et comportementales, afin d’explorer les conditions de mise en œuvre de politiques de sobriété compatibles avec le bien-être des individus et des territoires.Sur une durée de 24 mois, Sufficiency 2026 prévoit l’organisation d’un workshop de deux jours et de deux réunions de travail, pour aboutir à un cadre conceptuel commun, identifier des axes de recherche prioritaires, et valoriser les résultats et discussions sous forme d’articles scientifiques et/ou ouvrages-média grand public. L’objectif sera aussi de poser les bases d’un projet ANR structurant pour l’appel 2027.
La transition énergétique ne se résume pas à un changement technologique ; elle implique une transformation systémique des usages, des comportements et des modes de vie. Dans cette perspective, la sobriété énergétique, qui est comprise comme la réduction volontaire et organisée de la consommation d’énergie, s’impose comme un levier incontournable pour atteindre les objectifs climatiques, limiter les pressions sur les ressources et renforcer la résilience des systèmes énergétiques. Les fondements conceptuels de la sobriété trouvent leur origine dans la « bioéconomie » et l’économie écologique, qui a dès les années 1970 posé la question des limites physiques à la croissance (Georgescu-Roegen, 1975 ; Daly, 1991, 1996).
Cependant, cette sobriété ne peut être pensée sans prendre en compte le bien-être énergétique, entendu comme la capacité à satisfaire les besoins essentiels, la santé et l’équité. C’est précisément cette articulation entre sobriété et bien-être énergétique que le projet Sufficiency 2026 entend explorer. Dans la lignée de la théorie du donut (Raworth, 2018 ; Fanning & Raworth, 2025), le bien-être peut être compris comme la recherche d’un équilibre entre deux bornes. D’une part, le plancher social, garantissant à chacun l’accès aux besoins essentiels (énergie, santé, logement, mobilité, participation sociale) ; et d’autre part, le plafond écologique, au-delà duquel la pression exercée sur les écosystèmes devient insoutenable. Entre ces deux limites, l’« espace sûr et juste pour l’humanité » est celui où la satisfaction des besoins humains est assurée sans compromettre les équilibres planétaires. Cette approche conduit à penser la sobriété comme condition du bien-être collectif, nécessitant à la fois de réduire les consommations et de considérer une exigence de justice (re)distributive. Les travaux récents confirment sa pertinence : des niveaux élevés de bien-être peuvent être atteints avec des consommations énergétiques bien inférieures aux moyennes actuelles (O’Neill et al., 2018).
Cette perspective de la sobriété ouvre la voie à une redéfinition de la prospérité, déjà présente chez Ivan Illich (1973) qui la fondait sur la mesure et la « convivialité » et la considérait comme voie d’émancipation, dépassant le cadre restrictif de la définition par la privation.
Ainsi, articuler sobriété et bien-être suppose d’analyser les arbitrages entre besoins, confort et réduction de consommation, de définir des indicateurs adaptés aux différentes échelles (ménages, territoires, systèmes), et d’identifier les leviers politiques, économiques et sociaux capables de soutenir cette transition.
Or, malgré un intérêt croissant, les travaux actuels demeurent fragmentés et souvent technocentrés. La sobriété reste un champ interdisciplinaire en émergence, à la croisée de l’économie, de la philosophie et des sciences sociales, appelant à une réflexion commune sur les indicateurs, les modes de gouvernance et les pratiques susceptibles de soutenir une transition sobre et équitable (Jungell-Michelsson & Heikkurinen, 2022). Ce projet entend ainsi combler cette lacune en proposant une approche intégrée, reliant les dimensions économiques, sociales, philosophiques, techniques et comportementales. Il se veut donc interdisciplinaire.
Sur le plan analytique, la mesure de la sobriété constitue un défi majeur. En économie, les comportements sobres sont complexes à quantifier car ils relèvent de décisions contextuelles, multi-déterminées et souvent non marchandes. Les indicateurs traditionnels (consommation d’énergie, revenus, intensité carbone) ne suffisent pas à saisir les dimensions qualitatives du changement de mode de vie ou de la réduction volontaire (Sandberg, 2021).
La sobriété pose donc un double enjeu scientifique : conceptuel, car elle reste à définir dans un cadre commun, et méthodologique, car sa mesure nécessite de dépasser les outils standards de l’économie de l’énergie pour intégrer les comportements, les valeurs et les contextes d’usage.
Objectifs
Le projet SUFFICIENCY 2026 poursuit quatre objectifs principaux :
- Structurer une communauté scientifique interdisciplinaire sur la sobriété et le bien-être énergétique.
- Élaborer un cadre conceptuel commun pour analyser ces notions dans le contexte de la transition énergétique.
- Identifier les axes de recherche prioritaires pour un futur projet ANR (indicateurs de bien-être, modélisation des comportements sobres, politiques publiques, gouvernance).
- Préparer et publier des livrables stratégiques (articles scientifiques, notes de cadrage, état de l’art, pistes méthodologiques) pour soutenir un dépôt ANR structurant en 2027.
Porteurs, antenne(s), partenaires
Le projet est porté par Stéphane Goutte (UMI Source, UVSQ, IRD), en partenariat avec United Nations Institute for Training and Research (UNITAR) et la chaire CEDRIS de la fondation Paris Saclay.A propos
Date de début de projet : 2026
Durée prévue : 2 ans
Type de financement : UP Saclay, PEPR Powdev, Chaire CEDRIS
Montant : 10 500 €